ROBERT ABI NADER « Mille et une nuits à Barbès ». C’est le titre qu’aurait pu porter le défilé de Robert Abi Nader. Obéissant à la maxime : « Pas assez cher, mon fils », la collection du couturier en avait rajouté dans la paillette. Les invités de prestige étaient à l’avenant : quelques « stars » de la télé réalité dont un Bachelor, côtoyait Jean-Pascal, dit Jipé, (d’on ne sait plus quelle Star Académie) et un ex bellâtre de l’Ile de la Tentation ; sans oublier Madame de Fontenay, gardienne inoxydable du vrai chic bien de chez nous. Ces people ne détonnaient pas avec le style Abi Nader : faut que ça brille ! En résumé : des transparences suggestives pour danseuses du ventre millionnaires. Il ne leur manquait plus qu’un caillou dans le nombril et des pompons au bout des seins… Tout le monde est reparti ravi sur son tapis volant. Haute couture printemps-été 2004 CHANEL Chez Chanel, l’indétrônable tailleur et l’indémodable robe noire étaient au rendez-vous. Le tout revisité, évidemment. Un événement qui a laissé de marbre les employés de l’EDF qui manifestaient tout près de là. Allez savoir pourquoi… Cela dit, le syndicalisme n’avait pas l’air d’être la tasse de thé des invités, toutes et tous venus pour admirer cette nouvelle collection très froufroutante signée évidemment par Karl Lagerfeld. Au programme du printemps et de l’été Chanel, beaucoup de noir et de blanc, des vestes de tailleur rigoureuses sur des jupes à volants et des tulles brodés. Des coupes classiques, longilignes, agrémentées de broderies discrètes, créaient un luxe sans ostentation. La dentelle ébouriffée et les volants foisonnant de hauts immatériels, étaient tempérés par des jupes droites, presque sévères. Un esprit résolument Mademoiselle. Pour finir, la mariée cachait la simplicité d’une robe fourreau sous une cape blanche de tulle bouillonnant et cascadant de volants. Simple, beau et sophistiqué à la fois. HAN SONG Les quelques belles idées qui émaillaient le défilé d’Han Song (comme ces ravissants bas blancs brodés de paillettes) n’arrivaient pas à faire oublier les lignes trop rigides et les matières roides de cette collection bien trop grise. Des tons métalliques, et des transparences de tamis, donnaient une allure plutôt froide à l’été. Une série de pantalons bouffants, du genre de ceux que portent les clowns blancs, n’ajoutaient rien d’original à cette mode peu convaincante. Malgré quelques jolis détails brodés de temps en temps sur une jupe, on avait un peu l’impression, par moments, que les mannequins étaient habillés avec des stores. Dommage. STEPHANE SAUNIER Le défilé de Stéphane Saunier valait cette longue attente, qui mit les patiences à rude épreuve. Après la simplicité des premiers modèles, en noir et blanc, vinrent des mets plus consistants : pantalon corsaire brodé de nacre et veste en raphia, bustiers-corsets avec incrustations de broderie, toujours en raphia, une matière de prédilection pour Stéphane Saunier. Les tailleurs, fermés avec des brandebourgs, étaient agrémentés de riches broderies et de passementeries. Une collection très élégante et équilibrée, qui reste très couture et toujours portable. Les corsaires en soie, en particulier, restent la grande réussite de cette saison. Une collection avec une unité de style, mais sans redondance, pleine de délicatesse, dont la silhouette flirte parfois avec les années 50. Les robes à bustier qui surmontent les jupes de tulle, brodées ou non, pourraient être portées par quelque Grace Kelly. Des matières légères, lourdement brodées, des plissés savants, jamais brouillons, un choix audacieux mais judicieux des couleurs… un travail somptueux qui reste élégant sans être sobre. De la haute couture, résolument. DOMINIQUE SIROP De la légèreté, de la fluidité et de la transparence. Ce sont sans conteste les mots d’ordre de la collection printemps-été de Dominique Sirop. Le très beau travail de plissé sur les satins et les tulles marqueront également ce défilé de haute couture, qui jouait également sur les transparences, en témoigne ce remarquable col de tulle, diaphane et parsemé de pierres de jais, qui restaient comme suspendue à des fils invisibles. Les robes du soir déclinées en satin, s’épanouissaient dans des drapés compliqués, agrémentés de broderies arachnéennes. La femme couture de Dominique Sirop est intemporelle, jusqu’à sa mariée, raffinée et virginale, délicate comme un Tanagra. CHRISTIAN LACROIX Ce qui serait criard chez d’autres est définitivement, positivement, absolument élégant chez Christian Lacroix. Sur des collants roses, et uniquement roses, l’exubérance des couleurs et des formes éclate. Les asymétries bohémiennes, les volants bouillonnants, les myriades de détails, le mélange apparemment anarchique des motifs… une absolue sophistication prend l’apparence d’un fouillis. Les admiratrices, venues nombreuses, ne se lassaient pas d’applaudir ce style qui a fait le succès du maître. Broderies baroques, franges, tulles savamment froissés, riches corsets-bijoux et délires de dentelles… Il n’y a que Christian Lacroix pour réussir à chaque fois, et toujours de façon différente, ce patchwork de matières précieuses. Toutes les couleurs de l’arc-en-ciel y passent, toutes en même temps, dans les doux froufrous de cette collection printemps-été… De la haute couture ? Dîtes plutôt de la haute voltige ! |